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Les sociétés malades de la Crise

De notre correspondant à Château-Thierry


Un mal qui répand la terreur,
Mal que les subprimes et la Bourse en leur fureur
Par contrecoup créèrent pour punir les excès bancaires
La Crise (puisqu'il faut l'appeler par son nom),
Capable d'enrichir en un jour la dette par millions,
Faisait aux sociétés la guerre.
Elles ne mouraient pas toutes, mais toutes étaient frappées :
On n'en voyait point d'occupées
A chercher par un financement le sursis ;
Nul projet n'excitait leur envie ;
Ni hedge funds ni OPA n'épiaient
La douce et innocente proie.
Les Banques point ne prêtaient ;
Plus de liquidités, partant plus de choix.

Le Président tint conseil, et dit : Mes chers amis,
Je crois que le Trading a permis
Par nos spéculations cette infortune ;
Que le plus coupable de nous
Se sacrifie au mondial courroux ;
Peut-être il obtiendra la guérison commune.
L'histoire nous apprend qu'en de tels accidents
On fait de pareils dévouements :
Ne nous flattons donc point ; voyons sans indulgence
L'état de nos finances.
Pour moi, satisfaisant des appétits gloutons
J'ai prêté force pognon ;
Que m'avaient-ils donné ? Nulle assurance :
Même s'il m'est arrivé quelquefois de tancer
Voire des têtes faire tomber.
Je me dévouerai donc, s'il le faut ; mais je pense
Qu'il est bon que chacun s'accuse ainsi que moi
Car on doit souhaiter selon toute justice
Que le plus coupable subisse.

Sire, dit un Ministre, vous êtes trop bon Roi ;
Vos scrupules font voir trop de délicatesse ;
Et bien, financer à tort et à travers sottes espèces.
Est-ce un péché ? Non non. Vous leur fîtes, Seigneur,
En les aidant beaucoup d'honneur;
Et quant aux responsables démis, l'on peut dire
Qu'ils méritaient cette sévérité,
Etant de ces gens-là qui sur contribuables et sociétés
Se font un chimérique empire.

Ainsi dit le Ministre, et flatteurs d'applaudir.
On n'osa trop approfondir
Des pays du G8, ni des BRIC, ni des autres
puissances
Les moins pardonnables offenses.

Tous les gens querelleurs, jusqu'aux simples aigrefins,
Au dire de chacun, étaient de petits saints.
Le Trader vint à son tour, et dit : J'ai souvenance
Qu'en un panier de commodities passant,
Le gain, l'occasion, la facilité, et je pense
Quelque diable aussi me poussant,
Je tondis d'autres acteurs du marché en liquidant mes positions.
Je suis allé trop loin, puisqu'il faut parler clair.

A ces mots on cria haro sur le Trader.
Un Gouverneur de Banque Centrale prouva par son argumentation
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal.
Son opportunisme fut jugé un cas pendable.
Jouer avec les économies d'autrui sans garantie de profits ! quel crime abominable !
Rien que la perte de son bonus n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez intouchable ou justiciable,
Les jugements de Cour vous rendront blanc ou noir.

Voir La Fable Originale d'un Illustre Inconnu en cliquant sur ce lien : Les animaux malades de la peste - Jean de La Fontaine
Illustration : Aurelio.
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